La preuve et l’épreuve : statut pascalien de l’expérience

Gérard Ferreyroli.es

Le XVIIe siècle est celui où la science accède à la modernité en mathématisant le monde mais aussi en joignant l’expérience à la théorie1. Or Pascal, exemplairement par ses recherches sur le vide, représente «un moment décisif dans le processus de constitution, en France, de la pratique expérimentale »2. Mais le rôle de l’expérience n’est pas moins prégnant dans l’élaboration de son anthropologie que dans l’édification de sa physique : si saint Augustin lui donne une vision conceptualisée -notamment à travers le schème des trois concupiscences -de l’humanité déchue, elle n’a de valeur pour Pascal que corroborée par l’observation de la réalité des conduites humaines et en dernier ressort par l’examen de sa propre subjectivité («ce n’est pas dans Montaigne, mais dans moi que je trouve tout ce que j’y vois »3). Et comme cette anthropologie sert à son tour de pierre de touche au discours théologique que Pascal propose au libertin pour le convertir, on mesure que la notion d’expérience est de celles qui permettent d’éprouver le mieux la cohérence de l’œuvre pascalienne dans son déploiement, des Expériences nouvelles touchant le vide aux Pensées. C’est la raison pour laquelle je m’attacherai à traiter