(Go: >> BACK << -|- >> HOME <<)

Publicité
En chiffres

Enquête Pisa : les forces et faiblesses des élèves français

L'OCDE publie ce mardi son enquête internationale sur les élèves âgés de quinze ans. Les résultats de la France se situent en bas du top 20, légèrement au-dessus de la moyenne de l'OCDE. Mais l'Hexagone reste la championne des inégalités entre élèves.

Les élèves français estiment ne pas être assez soutenus par leurs enseignants. Seuls 57 % affirment que ces derniers s'intéressent aux progrès de chaque élève, contre 70 % en moyenne dans l'OCDE.
Les élèves français estiment ne pas être assez soutenus par leurs enseignants. Seuls 57 % affirment que ces derniers s'intéressent aux progrès de chaque élève, contre 70 % en moyenne dans l'OCDE. (Bruno DELESSARD/Challenges-REA)

Par Marie-Christine Corbier

Publié le 3 déc. 2019 à 08:59Mis à jour le 6 déc. 2019 à 17:01

Le verdict est tombé. L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié, ce mardi matin, l'étude Pisa (Programme international de suivi des acquis des élèves) qui a mesuré les performances d'élèves de quinze ans dans 79 pays. Au total, 600.000 élèves ont passé le test en mai 2018, dont 6.300 en France, tirés au sort dans des établissements publics comme privés. La plupart étaient inscrits en seconde, mais certains étaient encore au collège et d'autres, déjà en première.

Tour d'horizon des principaux résultats :

1 - Des résultats légèrement supérieurs à la moyenne

Publicité

La France se situe en bas du top 20, « entre le 15e et le 21e rang », selon l'OCDE, qui tient compte, avec cette fourchette, des imprécisions liées aux échantillons statistiques. « Elle est légèrement au-dessus de la moyenne, ce n'est pas si catastrophique que cela », relativise Eric Charbonnier, expert en éducation à l'OCDE. « Les évolutions sont assez faibles, la France a une place honorable », complète Pauline Givord, analyste à l'OCDE qui a travaillé sur Pisa.

L'enquête internationale étudie tous les trois ans les résultats des élèves en compréhension de l'écrit , en mathématiques et en culture scientifique. Elle a mis l'accent, cette année, sur la compréhension de l'écrit (lecture et écriture), comme en 2000 et en 2009 - les domaines majeurs changent tous les trois ans. Dans ce domaine majeur étudié en 2018, le score moyen des élèves français atteint 493 points, légèrement au-dessus de la moyenne de l'OCDE (487 points), ce qui vaut à la France d'être classée entre le 20e et le 26e rang.

La performance n'a « pas évolué de manière sensible » depuis la première édition du test Pisa en 2000, relève l'OCDE, mais « la stabilité apparente » des résultats cache « des évolutions divergentes selon les élèves » : le niveau des meilleurs a augmenté et celui des plus faibles a baissé, surtout entre 2000 et 2009.

En mathématiques, c'est différent : les résultats ont diminué pour les meilleurs comme pour les plus faibles, mais la baisse a surtout été enregistrée entre 2003 et 2006, les résultats étant stables entre 2006 et 2018.

2 - Les pays asiatiques toujours en tête

Quatre provinces chinoises, « plutôt favorisées » selon l'OCDE, figurent cette année en tête du classement, devant Singapour, l'Estonie, le Canada, la Finlande, l'Irlande et la Corée. Critiquant le « bashing exagéré » à l'égard des pays asiatiques, Eric Charbonnier cite en exemple la Corée : elle « valorise » les enseignants qui travaillent avec les élèves les plus en difficulté et développe les matières artistiques dans les programmes, pour « améliorer le bien-être des élèves ».

3 - Des voisins qui progressent

La France se situe à un niveau comparable à celui de l'Allemagne, de la Belgique, du Portugal ou de la République tchèque. Portugal, Royaume-Uni et Irlande sont les voisins de la France qui ont nettement progressé. Dans cette catégorie, il faut ajouter l'Estonie et la Pologne. L'Estonie a entrepris des réformes pour lutter contre l'échec scolaire, en accordant « beaucoup d'importance à la petite enfance » et en donnant des primes aux enseignants dans les zones les plus rurales d'Estonie, approuve l'OCDE. La Finlande fait un peu moins bien qu'en 2000, même si elle reste dans les pays les mieux classés. Après avoir bien progressé suite au « Pisa Schock » entre 2000 et 2009, l'Allemagne recule pour ses résultats en sciences.

4 - Une élite « stable »

Publicité

En France, Le quart des élèves français les plus performants affichent un niveau comparable avec les pays les mieux classés (Japon, Corée, Finlande…) tandis que le quart des élèves les moins bons se classent au niveau des pays les plus en retard, comme la Turquie. La proportion de très bons élèves en France est, selon l'OCDE, « légèrement au-dessus de la moyenne » et elle est « stable » dans le temps.

5 - Jusqu'à 100 points d'écart entre élèves

En France, « en compréhension de l'écrit, les élèves des lycées professionnels ont obtenu des résultats inférieurs de 100 points à ceux obtenus par les élèves des lycées généraux et technologiques », contre 68 points d'écart en moyenne dans l'OCDE. « Les élèves les plus faibles sont plus souvent regroupés dans les mêmes établissements » que dans d'autres pays, pointe aussi l'organisation internationale.

6 - Les inégalités sociales, un « gros point noir »

Plus globalement, l'écart de résultats entre les élèves les plus favorisés et les plus défavorisés est passé de 110 points en 2009 à 107 points en 2018 (contre 89 en moyenne dans l'OCDE). Mais cette baisse « n'est pas significative », selon Pauline Givord. Depuis 2009, il n'y a pas eu d'aggravation des inégalités, mais la France n'a pas non plus su les réduire . Celles-ci restent « très inquiétantes », « c'est l'un des gros points noirs de l'enquête », selon l'OCDE. « La France fait partie des pays les plus inégalitaires avec le Luxembourg, Israël et la Hongrie », abonde Eric Charbonnier.

Ainsi, 20 % des élèves favorisés sont parmi ceux qui ont les meilleurs résultats en compréhension de l'écrit, mais seulement 2 % des élèves défavorisés. Les résultats des élèves en mathématiques et en sciences sont aussi fortement liés à l'origine sociale.

D'autres pays, comme le Portugal ou le Royaume-Uni, affichent des inégalités sociales plus faibles. « Il n'y a donc pas de fatalité », indique Pauline Givord.

7 - Une autocensure « inquiétante »

De nombreux élèves de quinze ans, en particulier ceux issus d'un milieu défavorisé, ont « des ambitions moins élevées que ce à quoi on pourrait s'attendre compte tenu de leurs résultats scolaires », relève l'OCDE. En France, un élève défavorisé sur cinq qui a de bons résultats n'envisage pas de terminer ses études supérieures. Les élèves défavorisés ont aussi cinq fois plus de risques d'être en difficulté en compréhension de l'écrit que les élèves favorisés.

Les inégalités persistent parce que la France « n'a pas assez agi sur les leviers qui permettent de lutter contre les inégalités », déplore Eric Charbonnier. Il évoque la meilleure formation des enseignants, l'investissement dans les établissements défavorisés ou dans les premiers niveaux d'éducation comme autant de pistes à explorer. Si la France a donné la priorité au primaire depuis 2012, la réaction a été « un peu tardive », ajoute-t-il, et « les résultats ne se verront pas avant 2027 voire 2030 ». L'OCDE préconise de lancer « un grand chantier du métier d'enseignant où on aborderait le salaire, la formation initiale et continue, le temps de travail, l'évaluation » pour faire en sorte que « le métier soit plus attractif et l'évolution de carrière plus rapide ».

8 - Des élèves français « peu soutenus » par leurs enseignants

Les élèves français estiment ne pas être assez soutenus par leurs enseignants. Seuls 57 % considèrent que ces derniers s'intéressent aux progrès de chaque élève, contre 70 % en moyenne dans l'OCDE. « Ce sont les élèves les plus favorisés qui disent manquer le plus de soutien », indique Eric Charbonnier, ce qui renvoie à « beaucoup de littérature sur les établissements élitistes où il y a de la casse ». Il évoque « des enseignants prisonniers du programme scolaire qui travaillent pour les meilleurs élèves ». Plus de 25 % (contre un sur huit en moyenne dans l'OCDE) des élèves français estiment aussi que des enseignants trop sévères peuvent « nuire à l'apprentissage des élèves ».

9 - Un problème de discipline

La France est, avec l'Argentine et le Brésil, « l'un des trois pays où les élèves font part des plus grandes préoccupations liées aux problèmes de discipline en classe ». Un élève français sur deux (contre un sur trois dans l'OCDE) déclare qu'il y a du bruit en classe dans la plupart voire dans tous les cours. Et, pour plus de deux élèves sur cinq, le temps d'apprentissage est réduit en raison du bruit.

« Les élèves français sont parmi ceux qui expriment le plus de sentiments négatifs sur leurs conditions d'apprentissage, relève Pauline Givord. La France a des professeurs extrêmement bien formés dans leur discipline, mais beaucoup moins sur les aspects professionnels du métier et la gestion de classe. » Or, les pays qui affichent les meilleurs résultats dans Pisa ont « tous » investi massivement dans la revalorisation du métier d'enseignant et sur le volet pédagogique de leur formation.

10 - Des élèves « heureux » malgré tout

Les élèves français lisent de moins en moins par plaisir (55 % contre 61 % en 2009). Ils ont davantage « peur de l'échec » que la moyenne des pays de l'OCDE. Ils ont aussi moins confiance en eux (59 % contre 71 % pour la moyenne de l'OCDE). Ils sont plus d'un tiers (31 %) à se sentir « comme un étranger à l'école » (20 % dans la moyenne OCDE). Mais sept sur dix déclarent malgré tout être « satisfaits de leur vie », une proportion légèrement supérieure à la moyenne de l'OCDE. Même si ce résultat a baissé plus fortement en France qu'ailleurs depuis 2015, Eric Charbonnier conclut que les élèves, en France, sont « plutôt heureux ».

Marie-Christine Corbier

Entreprise - Solo.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres
Publicité